Chökhor Ling

Enseignements

Nagarjuna Comprendre comment fonctionne Esprit

Être bouddhiste en 2010

Par Vén. Gelek Drölkar

La voie tracée par le Bouddha et commentée par ses enseignements indique tous les aspects de la réalité. Au bout de ce chemin de vie, lorsque toute confusion au sujet du monde, des êtres et de soi-même est éliminée, l’Éveil déchire le dernier voile de l’ignorance et la réalité ultime apparaît.

Le Dharma est l’expérience de la sagesse du Bouddha et sa pratique est celle de qui parcoure aujourd’hui ce même chemin de réflexion et d’application. Son apprentissage est basé sur le témoignage authentique de l’“Ainsi Allé” (autre nom du Bouddha) dans une vérité qu’il appartient maintenant à chacun de s’approprier. Les fondements de la connaissance reposent sur les quatre socles des Quatre nobles vérités relatives à la souffrance, à son origine, à sa cessation et à la voie à suivre pour l’éradiquer. Il n’est rien de mieux à faire que de comprendre l’engrenage dans lequel, instant après instant, l’état émotionnel tisse le piège des souffrances continuelles. Pour se libérer de l’emprise des émotions destructrices de la paix en soi et de l’harmonie avec tout ce qui est, la connaissance approfondie des Quatre nobles vérités en est la clé. Seule la réflexion individuelle permet la compréhension et la reconnaissance des causes de la souffrance et pour ce faire, il est des questions essentielles que l’on doit se poser : quelle est la principale motivation de l’existence, soit le sens que l’on accorde personnellement à sa vie ? À partir de cela, il est utile de continuer à s’interroger sur ses comportements physiques, verbaux et mentaux. Avec quels ingrédients remplissons-nous notre quotidien : patience, intégrité, bonté ? Ou colère, mensonge et jalousie ? Qui peut mieux que soi-même répondre à cette question ? La pratique du Dharma permet d’ouvrir les yeux sur les actes négatifs responsables du mal-être et de développer les qualités dormant au fond de chacun. Nous sommes de fervents pratiquants de l’intérêt porté à nous-même qui engendre l’égoïsme, la peur, le sentiment d’abandon et le besoin d’être reconnu au point de rechercher avec avidité le pouvoir et la réussite à tout prix. Nous n’avons besoin d’aucun entraînement pour être expert dans la culture du désir insatiable qui en veut toujours plus et toujours mieux. Les Quatre nobles vérités enseignent l’art de repérer le fonctionnement de l’esprit pour devenir capable d’agir radicalement sur la nocivité des tendances habituelles qui détruisent toutes les chances de bonheur.
De ce fait, être bouddhiste en 2010 est bien la même manière d’être et d’agir qu’il y a 2500 ans, au temps du Bouddha. La situation géographique - Inde, Tibet ou Occident - n’importe pas plus que le temps qui passe. Nous partons voyager à l’autre bout de la Terre mais ce qui se déplace est toujours le même état d’esprit revêtu d’un corps paré d’ornements et de masques qui peuvent tromper sur la réalité. Au bout du compte, il n’y a bien que soi que l’on berne parce que l’on sera seul à en subir les conséquences.
Pour en finir avec la souffrance, il faut en détruire les causes et cesser d’en créer. À l’évidence et pour ce faire, nous avons besoin d’aide et d’un modèle à respecter. Parce que l’histoire de sa vie le confirme et qu’il en a tiré les leçons, les enseignements du Bouddha nous livrent les moyens d’abandonner les comportements blessants qui se retournent immanquablement envers soi. L’écoute attentive ou l’étude et la méditation jalonnent le chemin proposé. Et pourquoi faut-il nécessairement étudier, réfléchir et méditer ? Parce qu’il nous revient de construire les bases solides sur lesquelles nous pourrons élever la confiance. Car pour avoir le courage et la patience de transformer un état d’être égocentrique, instable et dépendant de lui-même, il nous faut développer un très grand désir de changement basé sur la confiance en la parole de celui qui nous guide.

 Conseils du Dharma

L’engagement enthousiaste : c’est celui qui, corps-esprit unis, nous amène à mettre en pratique au quotidien et en toute circonstance les principes les plus simples du bouddhisme avec la joie dans le cœur à partager entre tous et la tempérance dans l’action.
La stabilité : les sautes d’humeur dévoilent l’attachement à soi-même et le rejet des difficultés. Considérer toute situation même les plus éprouvantes comme des propositions d’évolution et au lieu de laisser se déchaîner les passions dans le tumulte du cœur, demeurer vigilant sur son comportement.
L’humilité : au cours de son existence, chacun reçoit sa part de travail à effectuer, comme une mission personnelle en quelque sorte. Inutile de chercher ailleurs ce qui est devant soi. Aider les autres et les aimer ne demande pas d’afficher le mot “héros” sur la pancarte de son front. L’aide est un souhait et une réalisation individuelle et profonde. Nul besoin de la reconnaissance du public pour cela.
La confiance : d’autres parleront de foi car il s’agit d’éliminer le doute pour que l’abandon soit total. Comme le petit enfant se love en toute confiance dans le giron de sa mère, l’aspirant spirituel doit avoir éprouvé ses doutes dans l’exercice comparatif des enseignements vis-à-vis de son habituel fonctionnement. Il doit avoir suffisamment réfléchi avec méthode pour que ses doutes soient dissipés devant l’évidence et la justesse de la sagesse du Bouddha qu'il expérimente par la méditation. Quant à l’abandon, c’est ici d’oser quitter ses habitudes réactives anciennement confortables, en s’engageant dans l’effort soutenu de la transformation. L’expérience personnelle de la confiance éloigne l’inquiétude et la peur. Lorsque le disciple trouve son maître, c’est l’anneau de la confiance qui rencontre le crochet de la compassion.
L’ordre et la régularité : entre les activités quotidiennes indispensables à la vie ordinaire tels le travail, les relations avec l’entourage, la famille, les loisirs et le repos, quelle place accorder aux activités spirituelles et comment organiser harmonieusement l’ensemble ? Il s’agit d’établir une convention entre soi et soi pour mettre de l’ordre dans son agenda et libérer le temps nécessaire à l’entretien de l’esprit. C’est ainsi faire preuve de cohérence envers soi-même que de partager son temps entre le monde extérieur et son propre monde intérieur. Reste la régularité. Sans une application persévérante, inutile d’espérer l’ombre d’un progrès. Inutile également le faux prétexte du : “Je ne peux pas le faire tant que… ceci ou cela.” À partir de l’instant où l’on pense au chemin, il est déjà tracé devant soi. Il n’y a plus qu’à faire le premier pas et à continuer d’avancer quelles que soient les ornières rencontrées. La confiance et l’attention régulière soutiennent efficacement la progression et les premiers résultats sont la récompense heureuse d’un engagement suivi et respecté.

Un bouddhiste n’est pas seulement heureux dans le temple ou sur son coussin de méditation. Il sème des graines d’amour et de bonheur partout où son karma le mène. Quels que soient la couleur du ciel ou le moelleux de la couche sur laquelle il dort, il se réjouit constamment d’être en vie.
Être bouddhiste en 2010, c’est, par l’exemple de sa conduite, donner à la Terre et à ses enfants l’espoir d’un monde en paix, comme celui qu’il porte en son cœur.

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